Le Monde dans les Livres

Samedi 26 juin 2010 à 17:08

http://lemonde-dans-leslivres.cowblog.fr/images/lapluie.jpgLa pluie, avant qu’elle tombe, Jonathan Coe
« Et bien moi, j’aime la pluie avant qu’elle tombe.» C’est ce que proclame la petite Théa, alors qu’elle se trouve au bord d’un lac, à la montagne, en compagnie de Rosamond et Rebecca. Et quand les deux femmes lui font remarquer que ça n’existe pas, la pluie avant qu’elle tombe, la petite fille répond : « Bien sûr que ça n’existe pas ; c’est pour ça que c’est ma préférée. Une chose n’a pas besoin d’exister pour rendre les gens heureux, pas vrai ? »
Du pathos bien amené me direz-vous ? Et bien non, pas ici, pas dans ce roman.
Gill, petite nièce de Rosamond, se voit confiée la lourde mission de retrouver Imogène. Imogène dont on ne sait rien, Imogène la petite aveugle à laquelle Rosamond, à sa mort, lègue une partie de son héritage. Mais à travers un récit en vingt étapes, la vieille femme raconte, sur des bandes audio, l’histoire de cette petite fille, et des deux générations de femmes qui l’ont précédée. Son arrière-grand-mère Ivy, sa grand-mère Béatrix, et sa mère Théa, la petite fille de l’extrait. Leur visage, leurs proches, leur vie émanent de photos que Rosamond s’efforce de décrire à Imogène qui ne voit plus ; elle décrit, mais surtout elle commente. Car c’est trompeur une photo, on sourit, mais on ne sait pas toujours que derrière les sourires immortalisés, une tragédie se joue dans l’ombre. Et Rosamond connaît ces coulisses, où tout n’est pas joli à voir. Parfois les mots jaillissent, à profusion ; de temps en temps, ils manquent, et la description de la photo constitue l’essentiel du chapitre; et parfois, voir la photo suffirait, l’image en dirait plus que toutes paroles. Mais pour Imogène, elle doit continuer à parler.
Il faut qu’Imogène comprenne d’où elle vient, qui elle est, et que sa venue est le fruit d’un concours de circonstances, d’un destin, ou d’un hasard des plus troublants. Chaque photo rappelle un évènement qui, plus ou moins puissamment, parfois insensiblement, a infléchi et orienté le destin de celle qui est devenue une jeune fille.
Les portraits croisés de toutes ces femmes dont les actes ont – peut-être, et c’est la question du roman !- orienté le destin d’Imogène, sont poignants, bouleversants, très « réels ». Ce sont des femmes embarquées par la vie, par ses troubles, et qui luttent pour vivre, en oubliant parfois leurs devoirs. Sont-elles le jouet du destin, ou est-ce que rien ne préside à la forme que prend leur existence ? Quelle place donner au hasard ?
Voilà la conclusion que propose Rosamond : la vie ne commence à avoir un sens qu’en admettant que parfois, souvent, toujours, deux idées absolument contradictoires peuvent être vraies en même temps.
Tout ce qui a abouti à toi était injuste. Donc, tu n’aurais pas dû naître.
Mais tout chez toi est absolument juste : il fallait que tu naisses.
Tu étais inévitable.
 
Mon avis : Un joli roman, grave et poignant comme l’annonce la quatrième de couverture, mais assez poétique, avec cette histoire de pluie « avant qu’elle tombe ». On ne s’ennuie pas, la narration est des plus originales avec ce choix d’un chapitre, une photo. On apprend à connaître les personnages, leurs évolutions, leurs rencontres. Et on ne doute petit à petit que tout mène à cette énigme, Imogène. Métaphore du destin, ou du non-destin, à nous de choisir, ce livre est vraiment agréable, se lit rapidement (on ne peut pas trop le lâcher!), il échappe au gnangnan, et brosse un tableau de l’histoire des femmes bouleversant. Toutefois, la fin est un peu décevante, ou plutôt un peu inutile à mon goût. Le livre aurait pu s’arrêter à la fin du récit de Rosamond.
Une lecture que l’on m’avait chaudement conseillée, et que je ne regrette aucunement, même si ce genre de roman n'est pas ce que je préfère… Mais je me mets aux contemporains ces derniers temps ! Et ce roman vient de sortir en poche

 
Je profite de cet article pour évoquer mes joies livresques du jour (qui sont assez nombreuses pour être évoquées !). D’abord, en allant au marché, je suis tombé sur un vendeur ambulant de romans ; j’ai fouiné. Résultat : je suis rentrée à la maison avec 7 romans de Zola – ce qui fait qu’il ne me manque plus que 3 livres pour posséder l’ensemble du cycle des Rougon-Macquart !- et la ferme intention de les avoir tous lus… un jour^^ ! Défi lancé, mais pas prêt d’être relevé !
Et seconde bonne surprise : j’ai trouvé Impuretés de Djian à la bibliothèque… et vous laisse pour aller me faire une opinion sur ce roman recommandé comme étant un des meilleurs de cet auteur que j’ai en grande estime ! (Finalement j'ai commencé Brooklyn Follies de Paul Auster... Mais Djan viendra bientôt!)
 
Par keisha le Samedi 26 juin 2010 à 17:17
As tu lu d'autres romans de Coe? Si non, lis testament à l'anglaise ou Bienvenue au club. Quant à celui ci (la pluie...) j'ai plutôt bien aimé, même s'il est différent de ceux que je cite.
Zola : oui! Il y a longtemps j'ai lu l'intégrale, sur plusieurs années quand même, un bel objectif!
Par L-Humanite le Samedi 26 juin 2010 à 18:56
L'histoire me tente :)
Par dasola le Jeudi 21 octobre 2010 à 18:58
Bonsoir, très beau roman qui montre l'étendue du talent de J. Coe. Il a su se renouveler. Quels beaux portraits de femmes! Bonne soirée.
 

Et vous, qu'en pensez-vous?









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