Le Cousin Pons, Balzac
Deux vieux Casse-Noisettes, une tenancière avide, un homme de loi malhonnête et usurpateur, et tout un panel de parisiens tous plus égoïstes les uns que les autres. Voilà présentés les acteurs de cette tragédie parisienne, volet masculin des Parents Pauvres. Pons, compositeur de musique passé de mode et maintenant amateur d’art célibataire, expert en bricabracologie, possède une importante collection d’objets d’art et de tableaux que tout son entourage lui envie. Non pas par amour de l’art ; mais pour son prix. Vivant avec son ami Schmuck, un allemand naïf à l’accent amusant, parangon de sincérité, le malheureux vieil homme est devenu un parasite, chassé petit à petit des maisons dans lesquelles il vient quémander à dîner. La chambre qu’ils occupent tous deux est la propriété de Madame Cibot, portière qui, lorsqu’elle apprend la valeur de la collection de Pons, use de tous les stratagèmes pour spolier le malheureux vieil homme. Mais Pons souhaite tout donner à Schmuck, et le binôme est le seul exemple de sincérité dans ce roman noir, dans lequel on ne serait pas surpris de voir apparaître Harpagon. Parce qu’au fond, même si Balzac fait ici la satire de la société parisienne avide et mesquine, ce roman aux scènes parfois théâtrales revêt de temps à autres une dimension comique, qui peut tendre vers le drame : on sourit lorsqu’on entend Schmuck parler, on rit des échecs de machinations de la Cibot, on est touché par l’amitié profonde qui unit les deux hommes. La force de l’amitié trouve son illustration la plus noble et la plus poignante avec ce duo masculin. Tel un Don Quichotte de l’art, accompagné de son fidèle Sancho, Pons tente de déjouer les plans de la Cibot et de ses parents (la Présidente par exemple) alors que Schmuck reste aveugle à tous ces traquenards, cette convoitise malsaine et destructrice, qui finira par causer la mort des deux bonshommes.
Un sympathique roman de Balzac, plus tragique que La Cousine Bette. L’amitié entre les deux hommes est des plus touchantes, et Pons, qui inspire horreur et terreur autour de lui, s’avère un personnage qu'on pourrait presque dire amoureux, en tout cas passionné, mais malheureusement mis au banc de la société. Aux yeux de ses parents et de l’affreuse Cibot, douce-amère, machiavélique, il doit apparaître comme un sac d’or surveillé par son Cerbère, Schmuck. Quel piètre gardien fait-il, ceci-dit, quand on connaît sa naïveté. Mais son amitié est grande, et cet allemand devient éclatant lorsque, alors que tout est fini pour Pons et qu’il est question du partage de l’héritage, on lui demande s’il est le père, le frère, le fils du défunt, il répond, avec son accent incomparable : Che zuis dout cela, et plis… che zuis son ami !
Pour Pons il ferait n’importe quoi, Che tonnerais pien tes chausses pir l’amisser, l’annui le cagne, dit-il au début du roman, avec cet accent qui me fait mourir de rire, et rappelle la talent de Balzac pour retranscrire fidèlement les dialectes de certains personnages – quand on l’a rencontré une fois, personne n’oublie le parler alsacien de ce bon gros Nucingen ! Jusqu’au bout il suit fidèlement son vieil et unique ami : il me zemble que che m’envonce dans la dombe afec toi, lui dit-il à son chevet. Un roman noir, je l’ai dit, mais une belle illustration de la force de l’amitié par ces Roméo et Juliette modernes, ce couple de célibataires qui vient agrandir le panthéon des personnages types qui voient le jour dans la littérature du XIXème siècle.
Petite anecdote pour la forme! Je tiens beaucoup à ce livre, que j'avais acheté avec quelques autres (dont Splendeurs et Misères des Courtisanes que j'avais dévoré) au Château de Saché (il y a le tempon dessus, avec un beau Balzac bedonnant!), ce fameux château dans les pays de Loire où Balzac allait se ressourcer (le propriétaire étant un de ses amis). Là bas il écrivait beaucoup (on peut voir le pupitre sur lequel il passait ses nuits à noircir des pages); la salle à manger de ce petit château a inspiré la descritpion de la tapisserie de la pension Vauquet, et la vallée que l'on peut apercevoir de la fenêtre de la salle qui est devenu salle de musée n'est autre que celle de Lys... So romantic!
Bref, je garde un souvenir mémorable de cette visite, et invite tous les amoureux de Balzac à s'y rendre. Mon plus beau souvenir de visites des châteaux de la Loire (même la magnificience de Chambord ne peut à mes yeux égaler le charme de ce petit fief de la littérature!)
Pour Pons il ferait n’importe quoi, Che tonnerais pien tes chausses pir l’amisser, l’annui le cagne, dit-il au début du roman, avec cet accent qui me fait mourir de rire, et rappelle la talent de Balzac pour retranscrire fidèlement les dialectes de certains personnages – quand on l’a rencontré une fois, personne n’oublie le parler alsacien de ce bon gros Nucingen ! Jusqu’au bout il suit fidèlement son vieil et unique ami : il me zemble que che m’envonce dans la dombe afec toi, lui dit-il à son chevet. Un roman noir, je l’ai dit, mais une belle illustration de la force de l’amitié par ces Roméo et Juliette modernes, ce couple de célibataires qui vient agrandir le panthéon des personnages types qui voient le jour dans la littérature du XIXème siècle.
Petite anecdote pour la forme! Je tiens beaucoup à ce livre, que j'avais acheté avec quelques autres (dont Splendeurs et Misères des Courtisanes que j'avais dévoré) au Château de Saché (il y a le tempon dessus, avec un beau Balzac bedonnant!), ce fameux château dans les pays de Loire où Balzac allait se ressourcer (le propriétaire étant un de ses amis). Là bas il écrivait beaucoup (on peut voir le pupitre sur lequel il passait ses nuits à noircir des pages); la salle à manger de ce petit château a inspiré la descritpion de la tapisserie de la pension Vauquet, et la vallée que l'on peut apercevoir de la fenêtre de la salle qui est devenu salle de musée n'est autre que celle de Lys... So romantic!
Bref, je garde un souvenir mémorable de cette visite, et invite tous les amoureux de Balzac à s'y rendre. Mon plus beau souvenir de visites des châteaux de la Loire (même la magnificience de Chambord ne peut à mes yeux égaler le charme de ce petit fief de la littérature!)